Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome XIII, 1.djvu/244

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
355 d
72
LETTRE VIII

vous de prendre un parti moyen, aussi bien vous qui fuyez l’oppression du pouvoir absolu que ceux qui aspirent à le reconquérir. Quant à ces derniers, leurs ancêtres autrefois, fait considérable, ont sauvé les Grecs des barbares. C’est grâce à eux que vous pouvez maintenant délibérer sur la forme du gouvernement. S’ils avaient eu le dessous, il ne vous serait rien resté du tout, ni discussion, ni espérance. À présent donc, aux uns, la liberté sous le pouvoir royal ; aux autres, l’autorité e royale responsable et soumise à des lois qui commandent aux citoyens et aux rois eux-mêmes s’ils n’agissent pas légalement. Pour organiser tout cela sainement et sans arrière-pensée, avec le secours des dieux, prenez comme rois, — d’abord mon fils, par une double reconnaissance envers moi et envers mon père (lui, jadis, a libéré la ville des barbares ; moi, dans les temps présents, je vous ai deux fois délivrés de la tyrannie, 356 vous en avez été témoins[1]) ; — puis comme second roi, celui qui a le même nom que mon père, le fils de Denys, pour le secours qu’il nous a apporté actuellement et pour la droiture de son caractère. Fils d’un tyran, il a volontairement affranchi la cité et s’est acquis à lui et à sa famille un honneur éternel au lieu d’une tyrannie éphémère et injuste ; — en troisième lieu, il faut appeler à la royauté de Syracuse, roi volontaire d’une ville librement soumise, le b chef actuel de l’armée ennemie, Denys fils de Denys, s’il veut bien transformer son pouvoir en forme monarchique, par crainte des retours de fortune, par pitié pour la patrie, les temples et les tombeaux délaissés et pour que son ambition ne ruine pas tout de fond en comble, à la grande joie des barbares. Donc ces trois rois, que vous leur confériez la puissance des rois Lacédémoniens ou une autorité moindre[2], et cela d’un commun accord, vous les constituerez de la manière suivante, qui est du reste celle déjà indiquée par moi[3]. c Écoutez-la cependant une fois de plus. Si la

    Une série de tyrans alors se succédèrent. Mais dix ans après sa chute, Denys réussit à reprendre encore pour quelque temps le pouvoir à Syracuse (Plutarque, Timoléon, c. 1).

  1. Cf. Lettre VII, 333 b, et notice particulière de cette même lettre.
  2. En fait, l’autorité des deux rois spartiates était à peu près nulle et leur charge presque uniquement honorifique et avant tout religieuse. Cf. G. Glotz, Histoire grecque, t. I, p. 362.
  3. Allusion probable à Lettre VII, 337 b et suiv.