et me souvenant en moi-même de sa figure et connaissant de même Théétète, quelquefois je les vois, quelquefois je ne les vois pas, tantôt je les touche, tantôt je ne les touche pas, tantôt je les entends ou les perçois par quelque autre sensation, et tantôt je n’ai à leur sujet aucune sensation, mais que je ne me souviens pas moins de vous et ne vous connais pas moins en moi-même ?
C’est tout à fait vrai.
Mets-toi donc dans l’esprit — c’est le premier des points que je veux t’éclaircir — que, ce qu’on sait, il se peut qu’on n’en ait pas la sensation, il se peut aussi qu’on l’ait.
C’est vrai.
Et pour ce qu’on ne sait pas, n’arrive-t-il pas aussi que souvent on n’en a même pas la sensation, et que souvent on en a la sensation et rien de plus ?
C’est possible aussi.
Vois donc si tu peux me suivre plus aisément à présent. Si Socrate connaît Théodore et Théétète, mais ne voit ni l’un ni l’autre, et n’a présentement aucune sensation à leur sujet, jamais il ne jugera en lui-même que Théétète est Théodore. Ai-je raison ou non ?
Oui, tu as raison.
Eh bien, c’était là le premier des cas dont j’ai parlé.
En effet.
Voici le second : connaissant l’un de vous, mais non l’autre, et ne percevant aucun de vous deux, je ne saurais confondre celui que je connais avec celui que je ne connais pas.
C’est juste.