Page:Platon - Théétète. Parménide, trad. Chambry.djvu/143

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Voici le troisième : ne connaissant ni ne percevant ni l’un ni l’autre, je ne saurais penser qu’un homme que je ne connais pas soit quelque autre de ceux que je ne connais pas davantage. Imagine-toi entendre de nouveau tous les cas que j’ai successivement énumérés auparavant, où je ne me ferai jamais d’opinion fausse sur toi et sur Théodore, soit que je vous connaisse ou ne vous connaisse pas tous les deux, soit que je connaisse l’un, et pas l’autre. Et c’est la même chose à l’égard des sensations, si tu me suis.

THÉÉTÈTE

Je te suis.

SOCRATE

Il reste par conséquent qu’on peut juger faux dans le cas suivant : Je te connais et je connais Théodore et j’ai dans mon bloc de cire vos empreintes à tous deux, comme si elles étaient gravées par un cachet. En vous apercevant de loin et indistinctement, je m’efforce d’appliquer la marque propre à chacun de vous à la vision qui lui est propre, et de faire entrer et d’ajuster cette vision dans sa propre trace, afin que la reconnaissance se fasse ; il peut alors se faire que je me trompe en ces opérations, que j’intervertisse les choses, comme ceux qui mettent à un pied la chaussure de l’autre pied, et que j’applique la vision de l’un et de l’autre à la marque qui lui est étrangère. On peut dire aussi que l’erreur ressemble à ce qui se produit dans un miroir, où la vue transporte à gauche ce qui est à droite : il arrive alors que l’on prend une chose pour une autre et qu’on a une opinion fausse.

THÉÉTÈTE

Je le crois en effet, Socrate. Tu décris merveilleusement ce qui arrive à l’opinion.

SOCRATE

Il y a encore un autre cas : c’est celui où, connaissant l’un et l’autre, je perçois en outre l’un, mais pas l’autre, et que la connaissance que j’ai du premier n’est point d’accord avec ma perception. C’est un cas que j’ai décrit précédemment, mais à ce moment-là, tu ne m’as pas compris.

THÉÉTÈTE

Non, en effet.

SOCRATE

Ce que je disais, c’est que si l’on connaît l’un, qu’on