LE VIEILLARD. Vous le niez ?
MÉNECHME. Oui, par Hercule, je le nie.
LA FEMME. Ah ! c’est trop d’effronterie, à moins que vous n’ayez déménagé cette nuit.
LE VIEILLARD. Éloigne-toi un peu par là, ma fille. (À Ménechme.) Que dites-vous ? vous avez donc déménagé ?
MÉNECHME. Pour aller où ? et à quel propos, je vous prie ?
LE VIEILLARD. Par ma foi, c’est ce que j’ignore.
LA FEMME. Eh ! il se joue de nous.
LE VIEILLARD, à sa fille. Veux-tu bien te taire ? (À Ménechme.) Allons, Ménechme, c’est assez plaisanter, parlons sérieusement.
MÉNECHME. Qu’ai-je à démêler avec vous ? Qui êtes-vous ? D’où sortez-vous: Que vous ai-je fait à vous, ou à cette créature qui ne sait comment m’importuner ?
LA FEMME, à son père. Voyez-vous comme ses yeux deviennent verts, comme ses tempes et son front prennent une teinte livide, comme son regard étincelle ! tenez.
MÉNECHME, à part. Je ne vois rien de mieux, puisqu’ils me disent fou, que de feindre de l’être ; la peur les éloignera.
LA FEMME. Comme il bâille et se détire ! Que ferai-je à présent, mon père ?
LE VIEILLARD. Viens par ici, ma fille, le plus loin de lui que tu peux.
MÉNECHME. Évoé ! Bacchus ! Bacchus ! pourquoi m’inviter à chasser dans les bois ? je t’entends, mais je ne puis m’éloigner de ces lieux, tant cette chienne qui est à ma gauche fait bonne garde. Et de l’autre côté ce méchant bouc, qui plus d’une fois dans sa vie par son faux témoignage a perdu un citoyen innocent.
LE VIEILLARD. La peste t’étrangle !
MÉNECHME. Oh ! voici qu’Apollon, par un oracle, m’ordonne de lui brûler les yeux avec des torches ardentes.
LA FEMME. C’est fait de moi, mon père ! il menace de me brûler les yeux. Ah ! malheureuse !
MÉNECHME, à part. Ils disent que je suis fou, et ce sont bien eux qui ont perdu le sens.
LE VIEILLARD. Hé, ma fille !
LA FEMME. Qu’est-ce ? que faire ?
LE VIEILLARD. Si j’appelais les esclaves ? C’est cela, je vais les chercher, pour qu’ils l’emportent et le lient à la maison avant qu’il fasse plus de vacarme.