Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/121

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

des consuls, par lesquels eux-mêmes étaient proclamés consuls. Ô ambition perverse et ignorante de la véritable grandeur ! désirer un honneur que l’on dédaigne, dédaigner un honneur que l’on désire ! et, lorsqu’on voit de ses jardins le champ de Mars et les comices, en être aussi absent que si on en était séparé par le Danube et le Rhin ! Le prince fuira donc les suffrages qu’il espère, et, content d’avoir ordonné qu’on le déclare consul, il n’observera pas même ces formes qui retracent l’image d’une cité libre ! il se cachera, il se dérobera aux comices, comme s’ils ôtaient l’empire, au lieu de donner le consulat ! Voilà l’idée dont se prévenaient des maîtres superbes ; ils croyaient cesser d’être princes, s’ils agissaient en sénateurs. Toutefois c’est moins par orgueil que par crainte que la plupart se tenaient à l’écart. Avec les adultères et les nuits impures dont leur conscience était chargée, auraient-ils osé souiller les auspices, et fouler de leurs pas impies et profanateurs un champ consacré ? Non, ils ne méprisaient pas assez les dieux et les hommes pour affronter et soutenir, sur ce théâtre éclatant, les regards indignés du ciel et de la terre. Vous, au contraire, votre modération et la sainteté de vos mœurs vous ont engagé à vous offrir à la présence auguste des dieux et aux jugements des mortels.

LXIV- D’autres ont mérité le consulat avant de le recevoir ; vous, César, vous le méritez de nouveau en le recevant. La solennité des comices était achevée, à ne considérer que le prince ; et déjà la foule du peuple commençait à s’ébranler, lorsqu’on vous vit, avec un étonnement général, vous avancer vers le siège du consul, et vous présenter à un serment dont les termes n’étaient connus de vos prédécesseurs que quand ils forçaient les autres de le prêter. Vous voyez combien il importait que le consulat fût accepté par vous : si vous l’eussiez refusé, nous n’aurions jamais pensé que vous feriez ce grand acte. Je reste confondu, pères conscrits, et j’en crois à peine mes yeux ou mes oreilles ; je me demande quelquefois si j’ai bien vu, si j’ai bien entendu. Ainsi donc un empereur, ainsi un César, un Auguste, un grand pontife s’est tenu debout en face du consul ; le consul est demeuré assis, tandis que le prince était debout devant lui, et il est demeuré assis sans trouble, sans crainte, comme si c’était un usage reçu. Le consul assis a dicté au prince debout la formule du serment ; et le prince