Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/127

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

nous confier hardiment à la loyauté du siècle : il se souvient que nous agissions autrement sous un mauvais prince. Nous prononcions des vœux pour l’éternité de l’empire et pour le salut des princes… je me trompe, pour le salut des princes, et, à cause d’eux, pour l’éternité de l’empire. Ces mêmes vœux ont été prononcés pour l’empire sous lequel nous vivons, et les termes en sont dignes de remarque : « À condition que vous gouvernerez avec justice et dans l’intérêt de tous. » Vœux dignes d’être toujours formés, d’être toujours entendus ! Autorisée par vous, César, la république a demandé aux dieux qu’ils assurassent votre conservation, si vous assuriez celle des autres : sinon, les dieux aussi pouvaient détourner de vous leurs regards protecteurs, et abandonner votre tête à ces autres vœux qui ne se font pas à haute voix. Vos prédécesseurs désiraient de survivre à la république, et en prenaient les moyens ; vous, César, votre salut vous est odieux, si celui de la république ne s’y trouve attaché. Vous ne souffrez pas qu’on vous souhaite un bien qui ne soit utile à ceux qui vous l’ont souhaité. Une fois par an, vous appelez sur vous le jugement du ciel, et vous exigez qu’il vous retire ses faveurs, si vous cessez d’être ce que vous étiez au jour de votre élection. C’est du reste avec une conscience bien sûre d’elle-même, César, que vous traitez avec les dieux pour votre conservation, sous la réserve que sous en serez digne : vous savez que les dieux connaissent mieux que personne si vous l’êtes en effet. Ne vous semble-t-il pas, pères conscrits, que le prince se dise nuit et jour : Oui, j’ai armé contre moi, si l’intérêt public le demandait, jusqu’à la main du préfet de mes gardes ; bien plus, je ne prie pas même les dieux de m’épargner ou leur courroux ou leur abandon ; je les supplie au contraire, je les conjure de faire que la république ne forme jamais pour moi de vœux qui lui répugnent, ou que, si elle venait à en former de pareils, elle ne fût pas tenue à leur accomplissement.

LXVIII- Vous trouvez donc, César, le fruit le plus glorieux de votre conservation dans l’assentiment des dieux immortels : car, lorsque vous les priez de vous conserver, à la condition expresse que vous gouvernerez avec justice et dans l’intérêt général, vous êtes certain de bien gouverner, puisqu’ils vous conservent. Aussi s’écoule-t-il pour vous dans l’allégresse et la sécurité ce jour qui tenait les autres princes en crainte et