Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/135

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qui est parvenu au plus haut rang où l’homme puisse monter n’a qu’un moyen de s’élever encore : c’est de savoir en descendre, comme sûr de sa propre grandeur ; car le danger de se rabaisser est celui de tous auquel la fortune des princes est le moins exposée. Pour moi, si j’admirais vos procédés généreux, j’en admirais encore plus les formes délicates. À voir quelle expression vos yeux, votre voix, vos mains prêtaient à vos paroles, on eût dit que les rôles étaient changés, tant vous prodiguiez les attentions de la politesse. Même, quand on accueillait avec l’approbation accoutumée les noms de ceux qui appuyaient les candidats, vous mêliez votre voix à celle de l’assemblée ; le chef de l’empire donnait son adhésion comme un simple sénateur ; et ce témoignage que nous nous plaisions à rendre au mérite, en présence du prince, lui était rendu par le prince lui-même. Aussi vous faisiez des hommes accomplis de ceux que vous déclariez tels. Et ce n’était pas seulement leur vie qui recevait la sanction de votre suffrage, c’était encore le jugement du sénat ; et cet ordre avait la joie d’être, autant qu’eux-mêmes, honoré par vos louanges.

LXXII- Vous avez demandé aux dieux que les actes de ces comices eussent pour nous, pour la république, pour vous-même, un heureux et favorable succès. Ne devrions-nous pas changer l’ordre de ces vœux, et conjurer le ciel de faire que toutes vos actions présentes et futures soient pour vous, pour la république, pour nous enfin, une source d’avantages, ou, par un souhait plus brièvement exprimé, qu’elles en soient une pour vous seul, en qui nous existons, et nous et la république ? Il fut un temps, hélas ! beaucoup trop long, où les prospérités et les revers étaient autres pour le prince, autres pour le sénat ; maintenant tout est commun entre César et nous, les joies comme les douleurs ; et nous ne pourrions pas plus être heureux sans vous, que vous-même ne le seriez sans nous. Eh ! si vous pouviez l’être, auriez-vous ajouté à la fin de vos vœux que vous n’en demandiez l’accomplissement au ciel qu’autant que vous continueriez à mériter notre affection ? Il est donc vrai, César, que vous ne mettez rien avant l’amour des citoyens, puisque vous voulez être aimé de nous premièrement, des dieux ensuite ; renonçant à l’être des dieux, si vous ne l’êtes de nous. Aussi bien, la fin des autres princes a montré que les dieux ne chérissent guère ceux que haïssent