Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/73

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arrivés au droit de cité par les privilèges du Latium, ou qu’ils l’eussent reçu de la bonté du prince, s’ils n’avaient reçu en même temps les droits de famille, on les traitait comme étrangers à ceux auxquels ils avaient tenu de plus près. Ainsi le plus grand des bienfaits devenait la plus cruelle des injustices ; et le titre de citoyen romain équivalait à la haine, à la discorde, à la privation de parents ou d’enfants, puisqu’ils divisaient, en dépit de leur tendresse, les personnes les plus chères l’une à l’autre. Il s’en trouvait cependant qui attachaient au nom romain un assez grand prix pour croire ne les pas payer trop du vingtième de leur fortune, et même du sacrifice de leurs affections. Mais ceux-là surtout méritaient de jouir gratuitement de ce titre, qui le tenaient en si haute estime. Votre père a donc réglé que les biens qui passeraient de la mère aux enfants et des enfants à la mère, quand même ceux-ci n’auraient pas reçu les droits de la famille avec ceux de la cité, ne seraient pas sujets au payement du vingtième. Il a garanti la même immunité au fils héritant de son père, pourvu qu’il fût placé sous la puissance paternelle ; persuadé sans doute qu’il y avait injustice, outrage, presque impiété, à ce que le nom d’un publicain se mêlât à ces noms respectables ; qu’un impôt ne pouvait, sans une sorte de sacrilège, s’interposer, pour les rompre, dans les relations les plus sacrées ; enfin qu’aucun revenu ne valait la peine qu’on rendît un père et un fils étrangers l’un à l’autre.

XXXVIII- Tel fut l’édit de Nerva ; édit moins généreux peut-être qu’il ne convenait à un si bon prince, mais digne toutefois d’un bon père qui, sur le point d’adopter un excellent fils, a voulu faire d’avance un acte de tendresse paternelle, et, content d’effleurer, pour ainsi dire, ou plutôt d’indiquer certaines réformes, a laissé à la bienfaisance de ce fils un ample exercice et une matière encore neuve. Votre libéralité a donc aussitôt couronné l’œuvre de la sienne, en réglant que le père héritier de son fils serait, comme le fils héritier de son père, affranchi du vingtième, afin qu’au moment où il cesserait d’être père, il ne perdît pas jusqu’à l’avantage de l’avoir été. Il est beau, César, de ne pas souffrir qu’un impôt soit levé sur les larmes paternelles. Vous voulez que le père possède sans diminution les biens de son fils, qu’il ne reçoive pas un compagnon de son héritage quand il n’en a pas eu de son