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QUATRIÈME ENNÉADE.


mouvement, les évacuations ou la satisfaction de la faim.

XXII. Faut-il aussi distinguer dans les végétaux quelque chose qui soit la propriété de leurs corps et une puissance qui le leur donne ? — Sans doute. Ce qu’est en nous la concupiscence, la puissance végétative (τὸ φυτιϰόν) l’est en eux.

La Terre possède aussi une pareille puissance, puisqu’elle a une âme ; et c’est d’elle que les végétaux tiennent leur puissance végétative. On pourrait avec raison demander d’abord quelle est cette âme qui réside dans la Terre. Procède-t-elle de la sphère de l’univers (que Platon paraît animer seule primitivement), en sorte qu’elle soit une irradiation de cette sphère sur la Terre ? Faut-il au contraire attribuer à la Terre une âme semblable à celle des astres, comme le fait Platon quand il appelle la Terre la première et la plus ancienne des divinités qui sont contenues dans l’intérieur du ciel[1] ? Pourrait-elle dans ce cas être une divinité si elle n’avait pas une âme ? Il est donc difficile de déterminer ce qu’il en est, et les paroles mêmes de Platon ne font ici qu’augmenter notre embarras au lieu de le diminuer.

D’abord, comment arriverons-nous à nous former sur cette question une opinion raisonnable ? On peut, d’après ce que la Terre engendre, conjecturer qu’elle possède la puissance végétative. Puisque l’on voit naître de la Terre même beaucoup d’animaux, pourquoi ne serait-elle pas elle-même un animal ? Étant d’ailleurs un grand animal et une partie considérable du monde, pourquoi ne posséderait-elle pas l’intelligence et ne serait-elle pas une divinité ?

  1. « Quant à la Terre, qui est notre nourrice, et qui s’enroule autour de l’axe par lequel l’univers est traversé, Dieu en a fait la gardienne et la productrice de la nuit et du jour, et elle est la première et la plus ancienne de toutes les divinités qui sont nées dans tout l’intérieur du ciel. » (Platon, Timée, p. 40 ; trad. de M. H. Martin, p. 109.)