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LIVRE CINQUIÈME.


donc pas à l’air, mais subsiste en elle-même ; l’air est seulement présent. En voici assez sur ce sujet.

VII. Quand l’objet dont la lumière émane vient à s’éloigner, la lumière périt-elle ou remonte-t-elle à sa source ? Cette question se rattache en effet aux précédentes.

Si la lumière se trouve dans le corps éclairé de telle sorte qu’elle lui soit devenue propre, elle périt avec lui. Mais, si elle est un acte immanent (sans cela, elle entourerait l’objet dont elle émane, elle y resterait intérieurement, elle s’y accumulerait), elle ne saurait s’évanouir tant que l’objet dont elle émane continue lui-même de subsister. Si cet objet passe d’un lieu à un autre, la lumière y passe aussi, non parce qu’elle reflue sur elle-même ou change de lieu, mais parce que l’acte de l’objet lumineux existe et est présent dès que rien ne s’y oppose. Si la distance du soleil à la terre était beaucoup plus considérable qu’elle ne l’est actuellement, la lumière du soleil s’étendrait cependant jusqu’à nous, pourvu qu’il n’y eût point d’obstacle dans cet espace. D’un côté, il y a dans le corps lumineux un acte, une espèce de vie surabondante, un principe et une source d’activité ; de l’autre, il y a au delà des limites du corps lumineux un second acte qui est l’image de l’acte propre à ce corps et ne s’en sépare pas. Tout être a un acte qui est son image, de telle sorte que, dès que l’être existe, son acte existe aussi, et que tant que l’être subsiste, son acte rayonne plus ou moins loin. Il est des actes faibles et obscurs, d’autres cachés, d’autres puissants qui rayonnent au loin. Quand un acte rayonne au loin, il faut admettre qu’il est là où il agit, où il exerce et manifeste sa puissance. Aussi voit-on la lumière jaillir des yeux des animaux qui les ont naturellement brillants[1] ; de même, quand les animaux qui ont un feu concentré à l’intérieur viennent à ouvrir leurs paupières, ils dardent des rayons de lumière dans les té-

  1. Voy. Aristote, De Generatione animalium, V, 1.