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LIVRE HUITIÈME.


il ajoute qu’elles doivent nécessairement tomber dans la génération après avoir été partagées en nombre déterminé[1]. Si Platon dit encore que Dieu a semé les âmes [dans les astres], il faut prendre cette expression dans un sens figuré, ainsi que l’allocution qu’il lui fait adresser aux autres dieux[2]. Car, pour traiter des choses contenues dans l’univers, on est obligé de les supposer engendrées et produites, parce qu’on ne peut énoncer et décrire que successivement ce qui est éternellement engendré et qui existe éternellement dans son état actuel[3].

V. On peut donc, sans se contredire, soutenir également, soit [comme le fait Platon[4]] que les âmes sont semées dans la génération, qu’elles descendent ici-bas pour la perfection de l’univers, soit qu’elles sont renfermées dans une caverne par suite d’une punition divine, que leur chute est à la fois un effet de leur volonté et de la nécessité (car la nécessité n’exclut pas la volonté), qu’elles sont dans le mal tant qu’elles sont dans des corps ; soit, comme le fait Empédocle, qu’elles se sont éloignées de Dieu et égarées, qu’elles ont commis une faute qu’elles expient ; soit, comme le fait Héraclite, que le repos consiste dans la fuite[5], que la descente des âmes n’est ni tout à fait volontaire, ni tout à fait involontaire. En effet, ce n’est jamais volontairement qu’un être déchoit ; mais, comme c’est par son mouvement propre qu’il s’abaisse aux choses infé-

  1. Voy. le passage du Timée cité dans les Éclaircissements de notre tome I, p. 469.
  2. Voy. ibid.
  3. Voy. ci-dessus, p. 121 et 283, note 2. Proclus cite en ces termes l’opinion de Plotin : « Plotin et ses successeurs, Porphyre et Jamblique, soutiennent que, si, dans le Timée, Platon affirme que le monde a été engendré, cela revient à dire qu’il est engendré par une autre essence. » (Commentaire sur le Timée, p. 85.)
  4. Plotin reprend ici toutes les citations qu’il a déjà faites ci-dessus dans le § 1, p. 477-479.
  5. ανάπαυλα ἐν τῇ φυγῇ c’est-à-dire, le repos consiste à fuir du ciel et descendre ici-bas. Voy. ci-après, p. 675.