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LIVRE HUITIÈME.


ensuite les choses peut rendre raison de chacun de leurs détails, dire pourquoi (δια τί (dia ti)) l’œil et les pieds sont tels, montrer que la cause de la génération de chaque partie se trouve dans ses rapports avec les autres parties, qu’elles ont toutes été faites les unes pour les autres[1]. Pourquoi les pieds ont-ils une certaine longueur ? C’est qu’un autre organe est tel : le visage, par exemple, étant tel, les pieds eux-mêmes doivent être tels. En un mot, l’harmonie universelle est la cause en vertu de laquelle toutes choses sont faites les unes pour les autres. Pourquoi cet individu est-il telle chose (τόδε (tode)) ? Parce que telle est l’essence de l’homme. L’essence et la raison d’être ne font donc qu’une seule et même chose. Elles sont sorties d’une seule source, du Principe qui, sans avoir besoin de raisonner, a produit ensemble l’essence et la raison d’être. Ainsi, la source de l’essence et de la raison d’être les donne toutes deux à la fois. Telles sont les choses engendrées, tel est leur Principe, mais d’une manière bien supérieure et bien plus vraie : car, sous le rapport de l’excellence, il a sur elles une immense supériorité. Or, puisque ce n’est point fortuitement, ni par hasard, ni par contingence, que les choses qui ont en elles-mêmes leur cause sont ce qu’elles sont ; puisque, d’un autre côté, Dieu possède toutes les choses dont il est le principe, évidemment, étant le père de la Raison, de la Cause, et de l’Essence causale (οὐσία αἰτιώδης (ousia aitiôdês)), toutes choses complètement affranchies de toute contingence, il est le principe et le type de toutes les choses qui ne sont pas contingentes, le Principe qui est véritablement et au plus haut degré indépendant du hasard, de la fortune et de la contingence ; il est cause de lui-même, il est par lui-même, il est Lui en vertu de lui-même (αἴτιον ἑαυτοῦ, ϰαὶ παρ’ αὑτοῦ, ϰαὶ δι’ αὑτον αὐτος (aition heautou, kai par’ hautou, kai di hauton autos)) : car il est Lui d’une manière suprême et transcendante (πρώτως αὐτος ϰαὶ ὑπερόντως αὐτός (prôtos autos kai huperontôs autos)).

  1. Voy. ci-dessus liv. VII, § 2, p. 411-414.