Page:Plutarque - Vies, traduction Ricard, 1829, tome 11.djvu/127

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

à la tyrannie leur patrie et la liberté, la défense d’y rester. Les consuls quittèrent Rome sans avoir fait les sacrifices qu’il était dans l’usage d’offrir aux dieux lorsqu’ils sortaient de la ville ; la plupart des sénateurs prirent aussi la fuite, saisissant, en quelque sorte, ce qu’ils trouvaient chez eux sous leurs mains, comme s’ils l’eussent enlevé aux ennemis : il y en eut même qui, d’abord très attachés à César, furent tellement troublés par la crainte que sans aucune nécessité ils se laissèrent emporter par le torrent des fuyards.

40

C’était un spectacle digne de pitié que de voir, dans une si terrible tempête, cette ville abandonnée, et semblable à un vaisseau sans pilote, flotter au hasard dans l’incertitude de son sort. Mais quelque déplorable que fût cette fuite, les Romains regardaient le camp de Pompée comme la patrie, et ils fuyaient Rome comme le camp de César. Labiénius lui-même, un des plus intimes amis de César, son lieutenant dans toute la guerre des Gaules, et qui l’avait toujours servi avec le plus grand zèle, quitta son parti et alla joindre Pompée. Cette désertion n’empêcha pas César de lui renvoyer son argent et ses équipages : il alla camper ensuite devant Corfinium, où Domitius commandait pour Pompée. Cet officier, qui désespérait