Page:Plutarque - Vies, traduction Ricard, 1829, tome 13.djvu/23

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détail les noms de chacun, et à quel usage ils sont propres ; il sentit, dis-je, qu'il serait honteux à un homme d'État, dont les fonctions publiques ne s'exercent que par le ministère des hommes, de mettre de la négligence et de la paresse à connaître ses concitoyens. Il s'attacha donc, non seulement à retenir les noms des plus considérables, mais encore à savoir leur demeure à la ville, leurs maisons de campagne, leurs voisins, leurs amis ; en sorte qu'il n'allait dans aucun endroit de l'Italie qu'il ne pût nommer facilement ; et montrer même les terres et les maisons de ses amis.

Son bien était modique, mais il suffisait à sa dépense ; et ce qui le faisait admirer de tout le monde, c'est que, avec si peu de fortune, il ne recevait, pour ses plaidoyers, ni salaire ni présent. Il fit paraître surtout ce désintéressement dans l'accusation de Verrès. Cet homme avait été préteur en Sicile, où il avait commis les excès les plus révoltants. Il fut mis en justice par les Siciliens : et Cicéron le fit condamner, non en plaidant contre lui, mais pour ainsi dire, en ne plaidant pas. Les autres préteurs voulaient le sauver, et, par des délais continuels, ils avaient fait traîner l'affaire jusqu'au dernier jour des audiences, afin que, la