Page:Plutarque - Vies, traduction Ricard, 1829, tome 5.djvu/343

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il prit un ton de voix bien au-dessus de son âge, et lui dit, comme s’il eût été inspiré par un esprit prophétique, que les Romains perdraient toute leur puissance lorsqu’ils se seraient remplis de cette érudition grecque. Le temps a fait voir la fausseté de cette prédiction sinistre ; car c’est lorsque les lettres grecques ont le plus fleuri à Rome, que cette ville est parvenue au plus haut degré de grandeur et de gloire. Mais Caton n’était pas seulement l’ennemi des philosophes grecs, il tenait aussi pour suspects ceux qui exerçaient la médecine ; et, comme il avait sans doute entendu parler de la réponse d’Hippocrate au roi de Perse, qui lui offrait plusieurs talents pour venir le traiter à sa cour, et à qui ce médecin fit dire qu’il n’irait jamais donner ses soins aux Barbares, qui étaient les ennemis des Grecs, Caton disait que c’était là un serment commun à tous les médecins ; et il avertissait son fils de les éviter tous également. Il avait composé, à ce qu’il dit lui-même, un ouvrage de médecine pour traiter les malades de sa maison et leur prescrire un régime convenable. Il ne leur imposait jamais une diète sévère ; il les nourrissait d’herbes, de chair de canard, de palombe ou de lièvre : il trouvait cette nourriture légère, facile à digérer pour les gens faibles, et n’ayant d’autre inconvénient

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