Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 1.djvu/361

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liers, les citadins se promener en robe sur la place publique, et les magistrats courir çà et là, faisant les empressés pour préparer des logements aux Romains, comme s’ils n’eussent eu rien à craindre, ni rien à se reprocher. Cette conduite n’ôta pas à Camille la certitude qu’il avait de leurs projets de révolte ; mais, touché des marques de repentir qui en étaient le désaveu, il leur ordonna d’aller trouver le sénat, pour prévenir les effets de son ressentiment. Il appuya même leurs prières ; il fit absoudre leur ville de toute accusation, et il obtint pour eux le partage des droits de la cité romaine. Telles furent les actions les plus éclatantes, de son sixième tribunat.

Quelque temps après, Licinius Stolon excita dans Rome une sédition violente, et souleva le peuple contre le sénat. Le peuple voulait à toute force que, des deux consuls élus chaque année, un fut pris parmi les plébéiens, et non pas tous les deux parmi les patriciens. Les tribuns du peuple furent d’abord élus ; mais le peuple empêcha que l’on continuât les comices, pour la nomination des consuls ; et la ville, faute de magistrats, allait être exposée aux plus grands troubles. Le sénat nomma donc Camille dictateur, pour la quatrième fois : c’était contre le gré du peuple ; et Camille lui-même n’accepta cette charge qu’avec répugnance. Il ne voulait pas avoir à lutter contre des hommes qui étaient en droit de lui dire, après tant de batailles gagnées, que ce qu’il avait accompli par leurs mains à la guerre était bien autre chose que tous les travaux politiques où il avait eu les patriciens pour aides. Il sentait d’ailleurs que les patriciens ne l’avaient élu que parce qu’il était désagréable aux plébéiens, et pour le mettre dans l’alternative, ou de tenir le peuple dans l’oppression, s’il avait l’avantage, ou, s’il avait le dessous, de se voir écrasé lui-même. Il essaya pourtant d’apporter un remède au mal présent. Averti du jour où les tribuns du peuple se proposaient de faire