Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 1.djvu/550

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profonde, une complète paralysie, enchaînant leur ardeur militaire.

La trêve expirée, Marcius rentra, avec toutes ses troupes, sur le territoire de Rome. On lui envoya une seconde députation, pour le supplier de calmer son ressentiment, et de retirer les Volsques de dessus les terres des Romains ; après quoi il pourrait faire et proposer ce qu’il croirait le plus expédient pour les deux peuples. « Les Romains, dirent les députés, n’accorderont rien à la crainte ; et, si les Volsques paraissent mériter quelque faveur, ils ne l’obtiendront qu’après avoir posé les armes. — Comme général des Volsques, répondit Marcius, je n’ai rien à vous dire ; mais, en ma qualité de citoyen romain, je vous conseille de rabattre un peu de votre orgueil, et de vous prêter à des conditions raisonnables. Revenez dans trois jours ; et apportez le consentement du sénat à mes demandes. Que si vous prenez une résolution contraire, je ne vous promets plus de sûreté à reparaître dans mon camp avec de vaines paroles. »

Les députés rapportèrent cette réponse ; et le sénat, comme on fait dans une tempête violente et quand le flot gronde, jeta, pour sauver l’État, l’ancre sacrée[1]. Il ordonna que les prêtres des dieux, les préposés aux mystères, les ministres des temples, et, avec eux, le collège des Augures, antique et nationale institution chez les Romains, iraient tous en députation vers Marcius, revêtus chacun des ornements qui sont d’usage dans leurs cérémonies ; qu’ils feraient tout leur possible pour l’engager à poser les armes, et à régler ensuite, avec ses concitoyens, les intérêts des Volsques. Marcius les reçut dans son camp ; mais il leur fit les mêmes refus qu’aux autres : même rudesse dans son air comme dans ses paroles. « Il faut, leur dit-il, ou accepter mes premières propositions, ou vous résoudre à la guerre. »

  1. La maîtresse ancre, l’ancre de miséricorde.