Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/224

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tiens, Alalcoménius, on commence, dès le point du jour, une procession que précède un trompette sonnant le mode guerrier ; il est suivi de chars remplis de couronnes et de branches de myrte. Après ces chars marche un taureau noir, et, derrière le taureau, des jeunes gens portant des amphores pleines de lait et de vin, pour les libations funèbres, avec des fioles d’huile et d’essence. Ces jeunes gens sont de condition libre ; car il n’est permis à aucun esclave de s’employer en rien à une cérémonie consacrée à des hommes morts en combattant pour la liberté. La marche est fermée par l’archonte des Platéens. Dans tout autre temps, l’archonte ne doit ni toucher le fer, ni être vêtu que de blanc ; mais, ce jour-là, il traverse la ville paré d’une robe de pourpre, ceint d’une épée, et tenant dans ses mains une urne qu’il a prise dans le greffe public. Il se rend au lieu où sont les tombeaux. Là, il puise de l’eau dans la fontaine, lave lui-même les colonnes tumulaires, les frotte d’essence, et immole le taureau sur un bûcher. Il adresse une prière à Jupiter et à Mercure Souterrain, et il appelle à ce festin et à ces effusions funéraires les âmes des hommes valeureux morts pour le salut de la Grèce. Puis, remplissant de vin une coupe, il la verse, disant à haute voix : « Je présente cette coupe aux guerriers morts pour la liberté des Grecs. » Telle est la cérémonie observée encore aujourd’hui à Platée.

Quand les Athéniens furent rentrés dans leur patrie, Aristide s’aperçut que le peuple cherchait à se rendre maître du gouvernement. D’un côté, la valeur que les citoyens avaient déployée meritait qu’on les traitât avec toutes sortes d’égards ; d’un autre côté, il n’était pas facile, lorsqu’ils avaient les armes à la main et qu’ils étaient enflés de leurs victoires, de les réduire par la force. Il fit donc un décret portant que tous les citoyens auraient part au gouvernement, et qu’on prendrait indistinctement les archontes parmi tous les Athéniens.