Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/259

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démolit tous les bâtiments qui faisaient saillie sur les rues, diminua le prix des travaux dont l’État faisait les frais, et afferma au taux le plus haut possible le revenu des impôts. Il s’attira, par ces mesures, la haine d’une foule de personnes. Aussi la faction de Titus Flamininus fit-elle casser par le Sénat, comme désavantageux, les baux et marchés qu’il avait faits pour la réparation des temples et des édifices publics ; et les plus audacieux des tribuns, excités par eux, le citèrent devant le peuple, et le firent condamner à une amende de deux talents[1]. On essaya aussi, par tous les moyens, d’empêcher la construction de la basilique qu’il élevait, aux dépens de l’État, dans le Forum, au-dessous du lieu où s’assemblait le Sénat ; mais il acheva son œuvre, et lui donna le nom de basilique Porcia.

Quant au peuple, il approuva magnifiquement, ce semble, la manière dont Caton avait exercé la censure : il lui érigea une statue dans le temple de la Santé, avec une inscription où n’étaient mentionnés ni ses exploits militaires ni son triomphe, et dont voici la traduction littérale : « À l’honneur de Caton, pour avoir relevé, dans sa censure, par de salutaires ordonnances, par des établissements et des institutions sages, la république romaine penchée vers sa ruine, et qui glissait dans la corruption. » Avant qu’on lui dressât cette statue, il se moquait de ceux qui désiraient ces sortes d’honneurs. « Ils ne voient pas, disait-il, que ce qui les rend si fiers n’est qu’un ouvrage de fondeurs et de peintres ; pour moi, mes concitoyens portent partout avec eux empreintes dans leur âme les plus belles images de moi-même. » Et, à quelques personnes qui s’étonnaient qu’on ne lui eût pas érigé de statue, tandis que tant de gens obscurs en avaient : « J’aime mieux, leur dit-il, qu’on demande pour-

  1. Environ douze mille francs de notre monnaie.