Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/261

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Socrate, c’était sa douceur et l’inaltérable bonté dont il avait toujours fait preuve avec une femme acariâtre et des enfants emportés. Lorsqu’il eut un fils, jamais affaire, même la plus pressée, à moins qu’il ne s’agît d’un intérêt public, ne l’empêcha d’être auprès de sa femme quand elle lavait et emmaillottait son enfant. Car c’était elle qui le nourrissait de son lait ; souvent même elle donnait le sein aux enfants de ses esclaves, afin qu’ils conçussent, par l’effet de ces soins communs, une affection naturelle pour son fils.

Dès que l’enfant eut atteint l’âge de raison, Caton s’occupa lui-même de l’instruire dans les lettres, quoiqu’il eût un esclave nomme Chilon, qui était habile grammairien, et qui enseignait plusieurs enfants. Il ne voulait pas, comme il le dit lui-même, qu’un esclave réprimandât son fils ou lui tirât les oreilles, pour avoir été trop lent à apprendre, ni que son fils dût à un tel personnage un aussi grand bien que celui de l’éducation. Il fut donc lui-même le maître de grammaire de son fils, son maître de jurisprudence, et son maître d’exercices. Il lui enseigna non-seulement à lancer le javelot, à combattre tout armé, à monter à cheval, mais encore à s’exercer au pugilat, à supporter le froid et le chaud, à traverser à la nage un courant impétueux et rapide. Il lui avait transcrit, de sa propre main, dit-il, des traits d’histoire, et en gros caractère, afin qu’il se pénétrât, dès la maison même, de l’exemple des anciens Romains. Il dit encore qu’il s’abstenait, devant son fils, de toute parole déshonnête avec autant de soin qu’il l’eût fait devant les vierges sacrées qu’on appelle vestales. Il ne se baignait jamais avec lui : c’était alors un usage général à Rome ; et les beaux-pères mêmes se seraient bien gardés de se baigner avec leurs gendres ; ils auraient rougi de se déshabiller et de paraître nus à leurs yeux. Depuis, ils apprirent des Grecs à se baigner nus avec les hommes ; et ils ensei-