Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/278

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à coup sûr, de comparer Antiochus à Xerxes, ni ces villes d’Espagne démantelées par Caton, à tant de milliers de Perses qui périrent sur terre et sur mer. Aristide, dans ces batailles, ne le céda à personne en courage ; mais la gloire et les couronnes, il les abandonna, comme aussi l’or et les autres richesses des vaincus, à ceux qui en avaient plus besoin que lui, parce qu’il était supérieur à tous ses rivaux.

Je ne blâmerai pas Caton de se vanter sans cesse, et de se mettre au-dessus de tous les Romains, encore qu’il dise lui-même, dans un de ses écrits, qu’il est aussi ridicule de se louer soi-même que de se blâmer. Mais celui qui se loue lui-même à tout propos me paraît d’une vertu moins parfaite que celui qui n’a pas même besoin de la louange des autres. La modestie ne sert pas médiocrement à introduire la mansuétude dans les transactions politiques ; au contraire, l’orgueil rend difficile, c’est une source d’envie ; et l’orgueil n’entra jamais un instant dans l’âme d’Aristide, tandis que Caton y fut très-sujet. Aristide, en favorisant les plus grandes entreprises de Thémistocle, en servant, pour ainsi dire, de satellite à son autorité militaire, releva la prospérité d’Athènes ; et il ne tint pas à Caton qu’en se déclarant l’ennemi de Scipion il n’empêchât et ne fît manquer cette expédition contre les Carthaginois qui abattit l’invincible Annibal : il finit même, à force de soulever contre Scipion de nouveaux soupçons et de nouvelles calomnies, par le chasser de la ville ; et il fit condamner son frère sous l’accusation du crime honteux de péculat.

La tempérance, que Caton a relevée si souvent par tant d’éloges et de si magnifiques, Aristide la conserva toujours pure et entière ; mais ce second mariage de Caton, si indigne de lui, si peu convenable à son âge, a répandu sur lui, à cet endroit, une tache assez grande, et non sans raison. En effet, si vieux, et lorsqu’il avait chez