Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/319

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dement à l’autre aile, il charge les Macédoniens, que l’inégalité et les coupures du terrain empêchaient de conserver leur forme de phalange, et de donner à leurs rangs cette profondeur qui était la force de leur armée. Quant à lutter d’homme à homme, les Macédoniens ne le pouvaient pas davantage, couverts d’armes pesantes et qui gênaient leurs mouvements. Car la phalange, tant qu’elle ne fait qu’un seul corps, qu’elle conserve ses rangs serrés et ses boucliers joints, ressemble à un animal d’une force indomptable. Mais, vient-elle à se rompre, chaque combattant perd sa force individuelle, à raison de l’espèce d’armure qu’il porte, et parce qu’il tirait sa force de la combinaison des parties de l’ensemble, bien plus que de lui-même[1].

L’aile gauche des ennemis étant ainsi mise en fuite, une partie des Romains s’attachent à sa poursuite ; les autres chargent en flanc ceux des Macédoniens qui combattaient encore, et en font un grand carnage. Vainqueurs il n’y a qu’un instant, ces derniers s’ébranlent à ce choc, et se sauvent en jetant leurs armes. Il n’y eut pas moins de huit mille Macédoniens tués à cette bataille, et environ cinq mille prisonniers. Philippe échappa ; mais ce fut la faute des Étoliens, qui s’arrêtèrent à piller son camp, pendant que les Romains étaient occupés à sa poursuite, si bien qu’à leur retour ceux-ci ne trouvèrent plus rien. De là, entre les Romains et les Étoliens, des paroles injurieuses, des querelles ouvertes. Mais les Étoliens offensèrent bien davantage Titus, en s’attribuant l’honneur de la victoire, et en se hâtant de répandre dans la Grèce la renommée de leurs prétendus exploits. Aussi, dans les vers des poètes et dans les chansons populaires composés à ce sujet, les Étoliens

  1. Voyez, sur l’ordonnance de la phalange macédonienne, les observations de Polybe à la fin du dix-septième livre de son histoire.