Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/347

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avait eue de Philippe avant son mariage avec Ptolémée.

Pyrrhus, par ce mariage, ayant ajouté encore à l’éclat de son nom, et secondé par Antigone, qui l’aimait tendrement, parvint à rassembler de l’argent et des troupes, pour faire une expédition en Épire et ressaisir la royauté. Son apparition ne déplut point au peuple, parce qu’on haïssait Néoptolème, dont le gouvernement était dur et violent. Dans la crainte pourtant que Néoptolème ne se refugiât chez quelqu’un des autres rois, il traita et fit amitié avec lui, en lui laissant la moitié du royaume. Mais, dans la suite, il y eut des gens qui animèrent les deux rois l’un contre l’autre, en leur inspirant des défiances réciproques. La principale cause de l’irritation de Pyrrhus vint de ce que je vais dire. Il était d’usage que les rois d’Épire offrissent dans Passaron, place de la Molosside, un sacrifice à Jupiter Martial, et qu’ils prêtassent serment aux Épirotes et se le fissent prêter par ceux-ci : eux-mêmes de gouverner conformément aux lois, et le peuple de maintenir la royauté conformement aux lois. Cette solennité eut lieu : les deux rois y assistèrent, chacun avec ses amis, et ils se firent réciproquement des présents nombreux. Là se trouva Gélon, homme dévoué à Néoptolème, lequel combla Pyrrhus d’hommages affectueux, et lui offrit deux paires de bœufs propres au labourage. L’échanson Myrtilus, qui était présent, les demanda à Pyrrhus ; celui-ci les lui ayant refusés et les ayant donnés à un autre, Myrtilus en éprouva un dépit qui n’échappa point à Gélon. Gélon l’invita à souper ; et, l’ayant enivré, il abusa, dit-on, de sa jeunesse et de sa beauté, et, de propos en propos, il l’engagea à prendre parti pour Néoptolème, et à empoisonner Pyrrhus. Myrtilus accueillit fort bien ces ouvertures, et feignit d’entrer dans ses vues, et d’être entièrement séduit ; mais il alla tout découvrir à Pyrrhus.