Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/348

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Le prince lui ordonna de mettre en rapport avec Gélon Alexicratès, le premier échanson, comme disposé à entrer dans le complot : son but était de se procurer plus de témoins.

Ainsi fut trompé Gélon ; Néoptolème, trompé avec lui, croyant l’entreprise en bon chemin, ne put en contenir sa joie, et il s’en découvrit à ses amis. Un jour qu’il était chez Cadméa, sa sœur, après un repas copieux il se mit à parler étourdiment de tout cela, pensant n’être entendu de personne. Il n’y avait là, en effet, que Phénarète, femme de Samon, l’intendant des petits et des grands troupeaux de Néoptolème, laquelle était couchée sur un lit, le visage tourné du côté de la muraille, et semblait dormir. Cependant elle avait tout entendu ; et dès le matin elle alla secrètement chez Antigone, femme de Pyrrhus, et lui raconta tout ce qu’elle avait entendu Néoptolème dire à sa sœur. Pyrrhus sut bientôt ce qui se passait : il n’agit cependant point pour le moment ; mais, à l’occasion d’un sacrifice qu’il offrait, il invita Néoptolème à souper avec lui, et le tua ; car il sentait bien que les principaux d’entre les Épirotes, dévoués à sa personne, applaudiraient à sa conduite s’il se débarrassait de Néoptolème, s’il ne se bornait pas à jouir d’une petite portion du royaume, mais faisait usage des qualités qu’il avait reçues de la nature pour se procurer une puissance plus grande, et, puisqu’il avait de justes sujets de méfiance, s’il prévenait Néoptolème en le faisant disparaître.

En souvenir de Bérénice et de Ptolémée, il donna le nom de Ptolémée à un fils qu’il eut d’Antigone, et celui de Bérénicis à une ville qu’il bâtit dans la Chersonèse d’Épire. Dès ce moment il médite de nombreuses et vastes entreprises : dans son espérance il prend même déjà les pays voisins ; or, voici à peu près le prétexte qu’il saisit pour se mêler des affaires de la Macédoine.

L’aîné des fils de Cassandre ayant d’abord fait mourir