Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/486

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par le moyen de ses amis, ne se rendît de nouveau maître d’Athènes. Pausanias en vint facilement à bout ; il réconcilia les Athéniens entre eux, apaisa la sédition, et réprima l’ambition de Lysandre.

Cependant les Athéniens ne tardèrent pas à se soulever de nouveau ; et Pausanias encourut un blâme universel. Il avait ôté au peuple, disait-on, le frein de l’oligarchie, et lui avait laissé tout pouvoir de se livrer à son insolence et à son audace. Lysandre, au contraire, y gagna le renom d’homme sévère, qui ne mettait dans l’exercice de son autorité ni complaisance ni ostentation, et qui n’en usait avec cette rigueur, que dans l’intérêt de Sparte. Il avait, du reste, la parole fière, et il était terrible à ceux qui lui résistaient. Les Argiens disputaient contre les Lacédémoniens pour les bornes de leurs territoires respectifs, et se flattaient de donner de meilleures raisons que leurs adversaires : « Celui qui tient en main celle-ci, dit Lysandre en montrant son épée, est celui de tous qui raisonne le mieux sur des limites de terres. » Un Mégarien lui parlait dans une conférence avec beaucoup de hardiesse : « Étranger, dit Lysandre, tes paroles auraient besoin d’une ville. » Les Béotiens balançant à se déclarer pour l’un ou l’autre parti : « Voulez-vous, demanda-t-il, que je passe sur vos terres, les piques hautes ou baissées ? » Lorsque les Corinthiens eurent fait défection, il fit approcher les Lacédémoniens de leurs murailles, et les troupes ne se pressaient pas d’aller à l’assaut ; lui, voyant un lièvre qui sautait le fossé : « N’avez-vous pas honte, dit-il, de craindre des ennemis qui sont si lâches, que les lièvres dorment tranquillement sur leurs murailles ! »

Cependant le roi Agis mourut, laissant un frère nommé Agésilas, et un fils putatif, Léotychidas[1]. Lysandre, qui

  1. Voyez la Vie d’Alcibiade dans le premier volume.