Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/58

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Dans un second combat, il repoussa le consul Hostilius qui voulait forcer les passages d’Élimie pour entrer en Macédoine, et qui avait pénétré à la dérobée dans la Thessalie : Hostilius n’osa accepter le combat que Persée lui offrait. Persée ne s’en tint pas même à cet ennemi ; et, comme si les Romains n’eussent pas mérité ses regards, et qu’il eût eu du temps à perdre, il s’en alla faire une incursion dans le pays des Dardaniens, tailla en pièces dix mille de ces barbares, et emporta un immense butin. En même temps il sollicitait les Gaulois habitants des bords du Danube, qu’on appelle Bastarnes, nation belliqueuse et forte en cavalerie. Il proposait aux Illyriens, par Genthius leur roi, de s’unir avec lui pour cette guerre : le bruit même courut que les barbares, gagnés par lui à prix d’argent, se préparaient à descendre par la Gaule inférieure, le long de l’Adriatique, pour entrer dans l’Italie.

Ces nouvelles fâcheuses firent sentir aux Romains que ce n’était plus le temps de donner à la brigue et à la faveur le commandement de leurs armées, et qu’il leur fallait y appeler eux-mêmes un général, homme de sens, et qui fût capable de conduire de grandes entreprises : cet homme, c’était Paul Émile, alors dans la pleine maturité de l’âge, car il avait près de soixante ans, mais qui n’avait rien perdu de sa vigueur corporelle, entouré d’ailleurs de gendres et de fils pleins de jeunesse, soutenu par un grand nombre d’amis et de parents qui jouissaient d’un grand crédit : tous ils le sollicitèrent vivement de se rendre aux désirs du peuple, qui le portait au commandement. Il montra d’abord une extrême répugnance, et se refusa longtemps à l’empressement et aux vœux de la multitude, sous prétexte qu’il n’était plus en état de commander ; mais, voyant qu’on se pressait chaque jour à sa porte, et qu’on l’appelait à la place publique avec des reproches et de grands