Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/211

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COMPARAISON
DE
NICIAS ET DE MARCUS CRASSUS.


Mettons en parallèle Nicias et Crassus. D’abord les richesses de Nicias furent acquises par des voies moins blâmables que celles de Crassus. Sans doute on ne peut trouver estimable l’exploitation des mines, puisqu’on n’y emploie ordinairement que des malfaiteurs et des Barbares, quelquefois enchaînés, et qui périssent dans ces lieux profonds et malsains. Mais, comparés à l’achat des biens que confisquait Sylla, aux spéculations sur le feu, les moyens mis en œuvre par Nicias paraîtront plus honnêtes. Et ce métier, Crassus le pratiquait ouvertement, comme il eût fait l’agriculture ou la banque. Pour les autres faits qu’on lui imputait, et qu’il persista toujours à nier, comme de vendre sa voix dans le Sénat, de commettre des injustices envers les alliés, de circonvenir les femmes par des flatteries, de receler des malfaiteurs, jamais on ne reprocha, même faussement, rien de pareil à Nicias : s’il donnait de l’argent aux sycophantes, s’il s’en laissait tirer par la crainte qu’il avait d’eux, et s’il en devint l’objet des railleries de la foule, il faisait là une chose qui n’eût pas convenu peut-être à un Aristide ou à un Périclès ; mais c’était pour lui une nécessité à cause de sa timidité naturelle. C’est même de quoi l’orateur Lycurgue se fit dans la suite honneur de-