Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/247

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mère, à laquelle il témoigna toujours une extrême tendresse : elle se nommait, dit-on, Rhéa. Il s’exerça d’abord à plaider, et, jeune encore, y réussit assez pour acquérir par son éloquence le plus grand crédit dans Rome ; mais l’éclat de ses succès militaires tourna son ambition du côté des armes.

Il fit sa première campagne sous Cépion[1], lorsque les Cimbres et les Teutons envahirent la Gaule. Les Romains furent défaits et mis en déroute : Sertorius, qui avait eu un cheval tué sous lui, et qui était lui-même blessé, traversa le Rhône à la nage, armé de sa cuirasse et de son bouclier, en luttant avec effort contre l’impétuosité du courant : tant son corps était robuste, et endurci à la fatigue par un long exercice ! Ces mêmes ennemis revinrent une seconde fois avec une armée innombrable, vociférant d’affreuses menaces, jusque-là que c’était alors un trait de courage extraordinaire à un soldat romain de tenir ferme à son poste et d’obéir à son général. Marius commandait l’armée ; et Sertorius entreprit d’aller reconnaître, comme espion, le camp des ennemis. Il se revêt du costume celtique ; il apprend les termes les plus usuels de la langue, afin de pouvoir parler au besoin avec ceux qu’il rencontrerait ; puis il va se mêler aux Barbares : après avoir vu et entendu ce qu’il importait de savoir, il retourna vers Marius. On lui décerna pour cet exploit des récompenses militaires. Tout le temps d’ailleurs que dura la guerre, il donna maintes fois des preuves signalées de prudence et de valeur, et se poussa fort avant dans l’estime et la confiance du général.

Après la guerre des Cimbres et des Teutons, il fut envoyé en Espagne sous le consul Didius, en qualité de

  1. Plusieurs éditions donnent Scipion : c’est une faute que nous avons déjà corrigée dans la Vie de Lucullus.