Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/342

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terie, et l’entraînent dans leur fuite. À la suite de cette déroute, les généraux, ne pouvant plus s’entendre, se retirèrent chacun de son côté ; et les villes, qui attribuaient à la crainte cette dispersion des ennemis, se rendirent à Pompée. Le consul Scipion marcha à son tour contre lui ; mais, avant que les deux armées fussent à la portée du trait, les soldats de Scipion, saluant ceux de Pompée, passèrent de leur côté ; et Scipion prit la fuite. Enfin Carbon lui-même détacha contre Pompée, sur les bords de la rivière Arsis, plusieurs compagnies de cavaliers : Pompée les charge vigoureusement, les met en fuite, les poursuit, et les force de se jeter dans des lieux difficiles, où la cavalerie ne pouvait agir : ils perdirent tout espoir de se sauver, et se rendirent à Pompée avec leurs armes et leurs chevaux.

Sylla ignorait encore ces combats ; mais, aux premières nouvelles, aux premiers bruits qu’il en eut, il craignit pour Pompée, enveloppé par tant et de si grands capitaines, et se hâta d’aller à son secours. Pompée, informé que Sylla était proche, commande aux officiers de faire prendre les armes, et de ranger l’armée en bataille, afin qu’elle parût devant le chef suprême dans toute sa beauté et dans tout son éclat. Il s’attendait de la part de Sylla à de grands honneurs : il en reçut de plus grands encore. Dès que Sylla le vit s’avancer avec ses troupes en bel ordre, composées de beaux hommes, toutes fières et joyeuses de leurs succès, il descendit de cheval, et, salué par Pompée du nom d’imperator, il le salua du même titre à son tour, au grand étonnement de tous : on ne s’attendait guère que Sylla communiquât à un jeune homme, et qui n’était pas encore sénateur, un titre pour lequel il faisait la guerre aux Scipion et aux Marius. Le reste de sa conduite répondit à ces premiers témoignages de satisfaction : il se levait toujours quand Pompée l’abordait, et il ôtait de dessus sa tête le pan de sa