Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/415

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position de Caton, qu’on ne ferait mourir aucun citoyen romain ailleurs que dans le combat, et qu’on ne pillerait aucune des villes sujettes de Rome ; et cette mesure augmenta encore la faveur dont le parti de Pompée était l’objet. En effet, ceux qui habitaient des lieux éloignés, et n’avaient nullement à s’inquiéter de la guerre, comme aussi ceux qu’on laissait à l’écart à cause de leur faiblesse, s’y intéressaient par leurs vœux, et soutenaient, du moins par leurs discours, les intérêts de la justice, tenant pour ennemi des dieux et des hommes quiconque ne souhaitait pas la victoire à Pompée.

César, de son côté, se montra doux et modéré dans ses succès. En Espagne, où il vainquit et fît prisonnière l’armée de Pompée, il renvoya les capitaines, et fit entrer les soldats dans son armée. Il repassa les Alpes, traversa en courant l’Italie, et arriva à Brundusium vers le solstice d’hiver. Là il s’embarque, et va reprendre terre à Oricum[1], d’où il dépêche Vibius, qu’il avait fait prisonnier, et qui était ami de Pompée, pour demander à Pompée une conférence, et lui proposer de licencier, sous trois jours, toutes leurs troupes, de renouer leur ancienne liaison, qu’ils confirmeraient par serment, et de retourner tous deux en Italie. Pompée crut voir dans ces avances un nouveau piège : il se hâte de descendre vers la mer, se saisit de tous les postes, de tous les lieux fortifiés propres à loger une armée de terre, de tous les ports, de toutes les rades commodes pour les vaisseaux.

Dans cette position, tous les vents favorisaient Pompée, et lui apportaient vivres, troupes et argent. César, au contraire, environné de difficultés, et par terre et par mer, n’avait plus guère d’espoir que dans le combat. Chaque jour il harcelait Pompée dans ses retranchements, et le provoquait à une action décisive. Il avait d’ordinaire l’avantage dans ces escarmouches : une fois pour-

  1. Ville d’Épire, sur la mer Ionienne.