Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/473

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Après la bataille d’Issus, il envoya des troupes à Damas, et fit enlever l’argent et les équipages que Darius y avait déposés, ainsi que les enfants et les femmes des Perses. Les cavaliers thessaliens y firent un butin considérable : comme ils s’étaient distingués dans le combat, Alexandre les y envoya exprès, pour leur donner une occasion de s’enrichir. Le reste de l’armée y amassa aussi de grandes richesses ; et les Macédoniens, qui goûtaient pour la première fois à l’or, à l’argent, aux femmes et au luxe des Barbares, firent ensuite comme les chiens qui ont tâté de la curée : ils se mirent à courir sur toutes les voies, cherchant à la piste les richesses des Perses.

Toutefois, Alexandre crut devoir s’assurer d’abord des places maritimes. Les rois de Cypre et de Phénicie vinrent aussitôt faire leur soumission : la seule ville de Tyr refusa de se rendre. Il en fit le siège, qui dura sept mois. Il éleva des digues pour fermer le port, mit en œuvre toutes les machines, et investit la place du côté de la mer, avec deux cents trirèmes. Il vit en songe, durant le siège, Hercule, qui lui tendait la main et l’appelait du haut des murailles. Plusieurs Tyriens crurent aussi, pendant leur sommeil, entendre Apollon leur dire qu’il s’en allait vers Alexandre, parce qu’il était mécontent de ce qui se faisait dans la ville. Les Tyriens traitèrent le dieu comme un transfuge pris sur le fait : ils chargèrent de chaînes son colosse, et le clouèrent sur sa base, en l’appelant Alexandriste. Alexandre eut, en dormant, une seconde vision : il lui sembla voir apparaître un satyre qui jouait de loin avec lui, et qui s’échappa lorsqu’il s’approcha pour le prendre. Vivement pressé et longtemps poursuivi par Alexandre, le satyre avait fini par se livrer entre ses mains. Les devins donnèrent à ce songe une interprétation qui n’eut pas trop d’incrédules : ils partagèrent en deux le mot satyre, et dirent à Alexandre que la ville se-