Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/522

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Ce fut alors, dit-on, qu’il s’écria : « O Athéniens, pourriez-vous imaginer à quels périls je m’expose pour mériter vos louanges ! » C’est là du moins ce que rapporte Onésicritus ; mais Alexandre dit seulement que les Macédoniens, après avoir quitté les bateaux, traversèrent la brèche avec leurs armes, ayant de l’eau jusqu’à la poitrine. Dès qu’il eut passé l’Hydaspe, il prit les devants, avec sa cavalerie, de vingt stades[1] sur les gens de pied, dans la pensée que, si les ennemis chargeaient avec leur cavalerie, il les battrait aisément avec la sienne, et, s’ils faisaient avancer leurs gens de pied, que son infanterie aurait le temps de le rejoindre. Une de ses deux prévisions se réalisa : l’attaque commença par un corps de mille chevaux et de soixante chariots, qu’Alexandre eut culbuté en un instant : il prit tous les chariots, et tua quatre cents cavaliers.

Porus reconnut, à cette vigoureuse réception, qu’Alexandre en personne avait passé le fleuve ; alors il s’avança avec toute son armée, et ne laissa que quelques troupes sur la rive, pour défendre le passage contre le reste des Macédoniens. Alexandre n’osa pas attaquer de front les éléphants et la grande multitude des ennemis : il alla charger l’aile gauche, et fit attaquer la droite par Cœnus. Les deux ailes de Porus furent enfoncées, et se retirèrent près des éléphants, pour se rallier. La mêlée devint très-vive alors, et les ennemis ne commencèrent à prendre la fuite qu’à la huitième heure du jour. Tels sont les détails qu’a donnés dans une de ses lettres le général même qui livra la bataille. Porus avait, s’il en faut croire la plupart des historiens, quatre coudées et une spithame[2] de haut ; la taille et la grosseur du cavalier répondaient à celles de l’éléphant qu’il montait, et qui

  1. Environ une lieue.
  2. La spithame était la moitié de la coudée