Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/601

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Il est vrai que la clémence dont il usa envers Cicéron, Brutus, et mille autres qui avaient porté les armes contre lui est une raison de le croire ; et l’on peut dire que, s’il composa ce discours, ce fut moins par un sentiment de haine contre la personne de Caton, que par une rivalité politique. Voici l’occasion qui fit naître cet écrit. Cicéron avait composé un éloge de Caton, et l’avait intitulé Caton. Cet ouvrage, sorti du plus grand orateur de Rome, et sur un aussi beau sujet, était, comme on peut le croire, fort estimé et fort couru. César en eut du chagrin : il regarda comme une censure qui s’adressait à lui-même l’éloge d’un homme dont il avait occasionné la mort. Il ramassa dans un écrit beaucoup de charges contre Caton, et intitula ce livre Anti-Caton. Les noms de César et de Caton font encore aujourd’hui à ces deux ouvrages de zélés partisans.

À son retour d’Afrique, son premier soin, à Rome, fut de développer devant le peuple, en termes magnifiques, les résultats de sa victoire : il dit que les pays qu’il venait de conquérir étaient si étendus, que le peuple romain en tirerait tous les ans deux cent mille médimnes attiques de blé et trois millions de livres d’huile. Il triompha trois fois : la première pour l’Égypte, la seconde pour le Pont, et la troisième pour l’Afrique. Dans le dernier triomphe Scipion n’était pas nommé, mais seulement le roi Juba. Juba, fils du roi, qui n’était encore qu’un tout jeune enfant, suivit le char du triomphateur. Cette captivité fut pour lui le plus heureux des accidents : né Barbare et Numide, il lui dut d’être compté parmi les plus savants des historiens grecs. Après ces triomphes, César fit de grandes largesses à ses soldats, et donna des festins et des spectacles au peuple : vingt-deux mille tables de trois lits chacune furent dressées à la fois pour traiter tous les citoyens. Il fit représenter, en l’honneur de sa fille Julie, morte depuis longtemps, des combats de