Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/606

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de nettoyer la rade d’Ostie[1], que des rochers couverts par les eaux rendaient périlleuse pour les navigateurs, et d’y faire des ports et des abris suffisants pour contenir le grand nombre de vaisseaux qui s’y rendaient de toutes parts.

Ces grands ouvrages restèrent en projets ; mais la réforme du calendrier, et l’ingénieuse correction qu’il imagina pour remédier à la perturbation du calcul du temps, fut heureusement conduite à fin, et devint depuis d’un usage aussi commode qu’agréable. Dans la haute antiquité, les Romains n’avaient jamais eu des périodes fixes et réglées pour accorder leurs mois avec l’année ; d’où il résultait que les sacrifices et les fêtes, en reculant peu à peu, se trouvaient successivement dans des saisons entièrement opposées à celles où on les devait célébrer. À l’époque même de César, où l’année solaire était seule en usage, le commun des citoyens n’en connaissait pas la révolution ; les prêtres, qui avaient seuls la connaissance des temps, ajoutaient tout à coup, sans que personne s’y attendit, le mois intercalaire, qu’ils appelaient Mercédonius[2] : ce mois, dont l’usage fut, dit-on, introduit par le roi Numa, n’était qu’un faible remède et un moyen bien court, pour corriger les mécomptes du calcul de l’année, comme je l’ai écrit dans la Vie de Numa[3]. César proposa le problème aux plus savants philosophes et mathématiciens de son temps, et publia, d’après les méthodes déjà trouvées, une réforme particulière et exacte, dont les Romains font encore usage, et à laquelle ils doivent de se tromper, ce semble, moins que ne font tous les autres peuples sur l’inégalité des temps. Cependant ses envieux, et ceux qui ne pouvaient

  1. À l’embouchure du Tibre.
  2. Il est nommé Mercédinus dans la Vie de Numa.
  3. Voyez cette Vie dans le premier volume.