Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/650

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outre les frais de la guerre, une amende dont on conviendrait.

Tous les autres envoyés acceptèrent ces conditions, les trouvant très-douces ; le seul Xénocrate s’en plaignit. « Antipater nous traite doucement pour des esclaves, dit-il, mais avec une grande dureté pour des hommes libres. » Phocion ayant prié Antipater de leur faire grâce de la garnison, Antipater répondit : « Phocion, je suis disposé à tout t’accorder, excepté ce qui causerait ta perte et la nôtre. » Quelques historiens racontent ce dernier fait d’une autre manière. Ils disent qu’Antipater demanda à Phocion s’il voudrait se rendre garant que la ville observerait le traité et ne remuerait plus, dans le cas où il se relâcherait sur l’article de la garnison ; que Phocion gardait le silence, et ne se pressait pas de répondre, lorsque certain Callimédon, surnommé Carabus, homme d’un naturel violent, et ennemi du gouvernement populaire, s’avança vers Antipater, et dit : « Eh bien ! si cet homme était assez imprudent pour cautionner la ville, t’y fierais-tu ? et en ferais-tu moins ce que tu as résolu de faire ? »

Les Athéniens furent donc forcés de recevoir une garnison macédonienne, commandée par Ményllus, homme modéré, et ami de Phocion. Cette condition fut trouvée fière et insultante par les Athéniens : c’était, à leurs yeux, vanité d’un homme qui veut abuser de son pouvoir avec insolence, plutôt qu’une précaution nécessaire à la sûreté des affaires. La conjoncture dans laquelle la garnison prit possession du port augmenta encore le ressentiment dés Athéniens ; car ce fut précisément le vingt du mois Boëdromion[1], pendant la célébration des mystères, et le jour où l’on conduit en pompe le dieu

  1. Correspondant, pour la plus grande partie, à notre mois de septembre.