Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/675

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homme[1] pour écrire que Caton avait passé dans un tamis les cendres du mort, pour en retirer l’or qui avait été fondu par le feu ; tant cet auteur se croyait permis de tout faire, non-seulement avec l’épée, mais encore avec la plume, sans avoir à en rendre compte, et sans craindre la censure !

Caton, à l’expiration de sa charge, quitta l’armée, accompagné non par des vœux et des louanges, vulgaires témoignages de bienveillance, mais par des larmes et des embrassements sincères. Partout où il passait, les soldats étendaient leurs vêtements sous ses pieds, et couvraient ses mains de baisers : honneurs que les Romains d’alors ne faisaient qu’à grand’peine à quelques-uns seulement de leurs généraux. Avant de retourner à Rome pour s’y occuper des affaires publiques, il voulut parcourir l’Asie, afin de s’instruire, et de connaître par lui-même les mœurs, les coutumes et les forces de chacune des provinces qui la composent. Il voulait aussi faire plaisir à Déjotarus, roi des Galates, lequel avait été lié avec son père par des nœuds d’amitié et d’hospitalité, et qui l’avait invité à le venir voir.

Voici quelle était sa manière de voyager. Dès le matin, il envoyait son boulanger et son cuisinier au lieu où il devait coucher. Ils y entraient modestement et sans bruit ; et, s’il n’y avait dans l’endroit aucun ami de famille de Caton, ni aucune personne de sa connaissance, ils allaient dans une hôtellerie, et lui préparaient ainsi à souper, sans se rendre à charge à personne. S’il n’y avait point d’hôtellerie, ils s’adressaient aux magistrats, et se contentaient du premier logement qu’on leur assignait. Souvent ou ne voulait pas croire à ce qu’ils disaient, et on les traitait avec mépris, parce qu’en parlant aux magistrats, ils n’employaient ni cris ni menaces ; et Caton, en arri-

  1. César, dans son Anti-Caton.