Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/687

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consul, et qui détendait Muréna, ne cessa, pour faire peine à Caton, de railler et de brocarder les philosophes stoïciens, et tourna si agréablement en ridicule ceux de leurs dogmes qu’on appelle paradoxes, qu’il fit rire les juges. On prétend que Caton lui-même ne put s’empêcher de sourire, et qu’il dit à ceux qui étaient près de lui : « En vérité, mes amis, nous avons un consul bien plaisant ! » Muréna fut absous ; mais il ne se conduisit point envers Caton en homme méchant et déraisonnable : il prit ses conseils dans les affaires les plus importantes, et ne cessa point, tant qu’il fut consul, de l’honorer et d’avoir en lui toute confiance.

Au reste, ce respect qu’inspirait Caton, il le devait à lui-même : sévère et redoutable seulement dans la tribune et au Sénat, il était, partout ailleurs, plein de douceur et d’humanité, avant son entrée en exercice dans le tribunat, il seconda le consul Cicéron de tout son pouvoir dans plusieurs circonstances ; et il l’aida à terminer heureusement les grandes et glorieuses actions qu’il avait commencées contre Catilina. Ce Catilina machinait un changement total dans le gouvernement, et la ruine de la république ; il soulevait partout des séditions et des guerres ; mais le complot fut dévoilé par Cicéron, et Catilina sortit précipitamment de Rome. Lentulus, Céthégus et plusieurs autres complices de la conjuration, taxant Catilina de faiblesse et de pusillanimité dans l’exécution de ses projets audacieux, complotèrent eux-mêmes de mettre le feu à la ville pour la détruire de fond en comble, et de ruiner l’empire en soulevant les nations et en allumant des guerres étrangères. Leur conspiration fut découverte ; et Cicéron, comme je l’ai écrit dans sa Vie[1], porta l’affaire au Sénat. Silanus, qui opina le premier, déclara les conjurés dignes

  1. Cette Vie est dans le quatrième volume.