Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/708

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de ce discours, en conserva un vif ressentiment contre Caton : il cessa pendant un long temps de le traiter en ami ; mais enfin ils se réconcilièrent.

Sur ces entrefaites, Crassus et Pompée allèrent trouver César, qui avait repassé les Alpes, et convinrent avec lui qu’ils demanderaient, eux, un second consulat pour l’année suivante, et, qu’à leur entrée en charge, ils feraient décerner à César la prolongation, pour cinq autres années, de son gouvernement des Gaules, et à eux-mêmes les provinces les plus considérables, avec de puissantes armées et des fonds pour les entretenir. Cet accord fut une véritable conspiration, dont le but était le partage de l’empire et la ruine de la république. Plusieurs citoyens honnêtes se préparaient à demander le consulat ; mais, quand ils virent Crassus et Pompée au nombre des candidats, ils se désistèrent de leurs poursuites, à l’exception de Lucius Domitius, mari de Porcia, sœur de Caton. Caton lui persuade de ne pas se retirer, et de n’avoir pas l’air de fuir un combat où il s’agissait, non du consulat, mais de la liberté de Rome. On commençait même à dire, dans la plus saine partie du peuple, qu’il ne fallait pas souffrir que Crassus et Pompée réunissent leur puissance, et rendissent trop pesante l’autorité du consulat ; qu’il fallait l’ôter à l’un ou à l’autre. Tous ceux qui étaient de cet avis se déclarèrent pour Domitius, et l’encouragèrent à suivre sa demande, en lui garantissant les suffrages de la plupart des citoyens, que la crainte forçait au silence. Pompée et Crassus craignirent qu’il n’en fût ainsi : ils dressèrent une embuscade à Domitius, lorsqu’il descendait avant le jour au Champ de Mars, précédé de flambeaux. L’esclave qui marchait devant Domitius pour l’éclairer, fut atteint le premier, et tomba mort ; les autres, chargés à coups de traits, prennent la fuite, excepté Caton et Domitius. Caton, quoique blessé au bras, retint Domitius, l’exhorta à tenir ferme, et à ne