buer à l’augmenter et à l’embellir. Lucullus, par cette raison, pressait vivement le siège, persuadé que Tigrane ne s’y résignerait pas, et que la colère le ferait changer de résolution, et le déterminerait à combattre : conjecture que vérifia l’événement. Cependant Mithridate dépêchait à Tigrane courrier sur courrier, lettres sur lettres pour le détourner de combattre, et lui conseillait de se borner à tenir sa cavalerie en campagne, pour couper les vivres à Lucullus. Taxile, que Mithridate lui avait envoyé, et qui accompagnait l’expédition, le conjurait d’éviter, de fuir les armes invincibles des Romains.
Tigrane recevait d’abord assez patiemment tous ces avis ; mais, quand les Arméniens et les Gordyéniens furent venus le joindre avec toutes leurs forces ; quand les rois des Mèdes et des Adiabéniens lui eurent amené toutes les leurs ; quand, des bords de la mer de Babylone[1] il lui fut arrivé beaucoup d’Arabes ; de la mer Caspienne des corps nombreux d’Albaniens[2] et d’Ibères[3], voisins de l’Albanie ; des rives de l’Araxe[4] une multitude de Barbares qui vivent sans roi : tous peuples qui venaient de bonne volonté, ou attirés par des présents ; alors les festins du roi et ses conseils même furent tout remplis de flatteuses espérances, de propos audacieux, de menaces barbares. Taxile courut risque de la vie pour s’être opposé à l’avis de ceux qui voulaient le combat ; et l’on soupçonna Mithridate de ne détourner Tigrane de la bataille que parce qu’il enviait à son gendre ce brillant succès. Aussi Tigrane ne voulut-il pas attendre Mithridate, craignant qu’il n’en vînt partager avec lui la