Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/118

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Thalamies, et à qui l’on donna le nom de Pasiphaé, parce qu’elle révélait ses oracles à tous ceux qui venaient la consulter[1]. Mais Phylarque[2] assure que cette déesse était Daphné, fille d’Amyclas : Daphné, fuyant les poursuites d’Apollon, fut changée en laurier, et honorée par ce dieu du don de prophétie. Ils leur disaient donc que les oracles de la déesse ordonnaient aux Spartiates de revenir tous à l’égalité prescrite par les lois de Lycurgue.

Agis, venant par-dessus tous les autres, et s’avançant au milieu de l’assemblée, dit, en peu de mots, qu’il fournirait le plus fort contingent à la constitution qu’il voulait établir. « Je vais mettre en commun, continua-t-il, toutes mes possessions, qui sont considérables, tant en terres labourables qu’en pâturages, et j’y ajoute six cents talents d’argent monnayé[3]. Ma mère et mon aïeule suivront mon exemple, ainsi que mes parents et mes amis, qui sont les plus riches des Spartiates. »

Le peuple admira la magnanimité du jeune homme, et fut ravi de voir enfin, après trois cents ans, un roi digne de Sparte. Mais ce fut alors que Léonidas s’éleva contre Agis avec plus de force : il sentait qu’obligé de faire le même sacrifice qu’Agis, ses concitoyens ne lui en auraient pas la même reconnaissance, et que, tous mettant également leurs biens en commun, celui-là seul en retirerait tout l’honneur, qui en aurait donné le premier l’exemple. Il demanda donc à Agis s’il croyait que Lycurgue eût été un homme juste et zélé pour le bien public. « Assurément, répondit Agis. — Eh bien, reprit Léonidas, où as-tu vu que Lycurgue ait jamais ordonné

  1. Le mot Pasiphaé signifie visible pour tout le monde.
  2. Historien contemporain d’Agis, qui avait composé une histoire de la Grèce en vingt-huit livres.
  3. Environ trois millions six cent mille francs.