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COMPARAISON D’AGIS ET CLÉOMÈNE
et
DE TIBÉRIUS ET CAÏUS GRACCHUS.


Nous avons terminé le récit que nous avions entrepris : il nous reste maintenant à considérer parallèlement les vies de ces quatre personnages. Les plus grands ennemis des Gracques, ceux-là même qui en ont le plus mal parlé, n’ont jamais osé nier qu’ils n’eussent été, de tous les Romains de leur temps, les plus heureusement nés pour la vertu, et que l’excellente éducation qu’ils avaient reçue n’eût encore ajouté à ces dispositions naturelles. Mais Agis et Cléomène semblent avoir eu une nature plus forte que les Gracques ; car, privés d’une éducation vertueuse, et élevés dans des mœurs et dans une discipline qui avaient corrompu leurs prédécesseurs, ils n’eurent néanmoins d’autres guides et d’autres maîtres qu’eux-mêmes dans la pratique de la sagesse et de la tempérance. D’ailleurs, les Gracques ayant vécu dans un temps où Rome avait atteint le plus haut degré de grandeur et de dignité, et où une noble émulation pour le bien enflammait tous les esprits, ils auraient eu honte d’abandonner cette succession de vertu paternelle qui leur était transmise par leurs ancêtres ; au lieu qu’Agis et Cléomène, dont les pères avaient suivi des principes tout différents, ayant trouvé leur patrie malade et corrompue, n’en furent pas moins ardents à embrasser la vertu. Le