même qu’elle avait toujours du poison caché dans une aiguille creuse qu’elle portait à ses cheveux. Toutefois il ne parut sur son corps ni marque de piqûre ni trace de poison ; on ne trouva pas même de serpent dans sa chambre : on disait seulement en avoir aperçu quelque frai le long de la mer, à l’endroit que regardaient les fenêtres du tombeau. Selon d’autres, on aperçut au bras de Cléopâtre la marque, à peine sensible, de deux piqûres ; et c’est à ce signe, semble-t-il, que César ajouta le plus de foi ; car, lors de son triomphe, il fit porter une statue de Cléopâtre dont le bras était entouré d’un aspic. Telles sont les diverses traditions sur ce point.
César, quoique très-fâché de la mort de cette femme, ne laissa pas néanmoins d’admirer sa magnanimité : il ordonna qu’on l’enterrât auprès d’Antoine avec une magnificence digne de son rang ; il fit faire aussi à ses deux suivantes des obsèques honorables. Cléopâtre mourut à l’âge de trente-neuf ans, après en avoir règné vingt-deux, et gouverné avec Antoine plus de quatorze. Antoine avait à sa mort cinquante-trois ans, suivant les uns, et, selon d’autres, cinquante-six. Toutes ses statues furent abattues[1] ; mais celles de Cléopâtre restèrent debout : Archidamus, qui avait été son ami, donna mille talents[2] à César, afin qu’elles n’eussent pas le même sort que celles d’Antoine.
Antoine laissa sept enfants de ses trois femmes : Antyllus, l’aîné de ceux qu’il avait eus de Fulvie, fut le seul que César fit mourir ; Octavie prit les autres, et les fit élever avec les siens. Elle maria la jeune Cléopâtre, fille de Cléopâtre et d’Antoine, à Juba, le plus aimable des rois[3]. Elle éleva Antonius, second fils de Fulvie, à une