Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/424

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où était le tyran, il rencontra un homme de sa connaissance, qui portait une victime nouvellement immolée, et qui lui en donna une portion ; puis il poursuivit sa route. Quand il eut marché pendant une partie de la nuit, la fatigue l’ayant obligé de s’arrêter pour se reposer quelques instants, il se coucha dans un bois qui touchait au chemin. Un loup survint, attiré par l’odeur de la chair, qui emporta la portion de victime ainsi que la valise où étaient les lettres ; car le courrier les avait attachées ensemble. Cet homme, à son réveil, ne trouvant plus sa valise, battit tous les environs pour la chercher ; mais ce fut en vain : alors, n’osant se présenter devant le tyran sans les lettres, il prit la fuite, et ne reparut plus ; de sorte que Denys n’apprit que beaucoup plus tard, et par d’autres, la guerre qui se faisait en Sicile.

Comme Dion s’avançait vers Syracuse, les habitants de Camarine vinrent se joindre à lui, ainsi qu’un grand nombre de Syracusains, qui, s’étant révoltés contre le tyran, étaient répandus dans les campagnes. Les Léontins et les Campaniens[1], qui gardaient avec Timocratès le quartier de Syracuse appelé les Êpipoles, sur un faux avis que leur fit donner Dion qu’il allait commencer par assiéger leurs villes, abandonnèrent Timocratès pour aller défendre leurs concitoyens. À cette nouvelle, Dion, qui était campé auprès de Macres[2], fit prendre les armes à ses troupes la nuit même, et arriva aux bords de l’Anapus, qui n’est distant de la ville que de dix stades[3]. Là, il s’arrêta, fit un sacrifice sur le rivage, et adressa ses prières au soleil levant. En même temps les devins lui prédirent

  1. Quelques-uns pensent qu’il faut lire ici Cataniens ; mais on sait, par Diodore, qu’il y avait au pied du mont Etna une peuplade qui portait le nom de Campaniens.
  2. Ce nom est inconnu en Sicile : on pense qu’il faut lire Acres, petite ville située entre le cap Pachynuin et Syracuse.
  3. Environ une demi-lieue.