Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/425

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de la part des dieux la victoire ; et tous ceux qui étaient présents, voyant Dion avec la couronne de fleurs qu’il avait prise pour le sacrifice, se couronnèrent aussi, par un mouvement unanime et spontané. Il n’avait pas avec lui moins de cinq mille hommes de ceux qu’il avait recueillis dans sa marche ; tous mal armés, à la vérité, car ils n’avaient pour se défendre que ce qui leur était tombé sous la main ; mais ils suppléaient au défaut d’armes par leur courage et par leur bonne volonté. Aussi, Dion n’eut pas plutôt donné l’ordre de partir, qu’ils se mirent à courir avec une extrême joie et en poussant de grands cris, s’exhortant les uns les autres à reconquérir la liberté.

Parmi ceux des Syracusains qui étaient restés dans la ville, les plus honnêtes et les plus considérables allèrent, vêtus de robes blanches, les recevoir aux portes de Syracuse. Le peuple courut se jeter sur les amis du tyran, et enlever les prosagogides[1], gens détestables, ennemis des dieux et des hommes, qui se répandaient chaque jour dans la ville, et se mêlaient aux Syracusains, recherchant avec curiosité ce que chacun disait et pensait, et allant ensuite en rendre compte au tyran. Ceux-là furent les premiers punis : le peuple les assomma sur-le-champ. Timocratès, n’ayant pu s’enfermer dans la citadelle, prend un cheval, sort de la ville, et, dans sa fuite, sème partout le trouble et l’effroi, exagérant à dessein les forces de Dion, afin qu’il ne parût pas avoir abandonné trop légèrement la ville. Dans ce moment, Dion se montra à la vue des Syracusains : il marchait à la tête de ses troupes, magnifiquement armé, ayant à ses côtés Mégaclès son frère et l’Athénien Callippus, tous deux couronnés de fleurs. Ensuite venaient cent soldats étrangers, qu’il avait choisis pour sa garde ; les autres suivaient

  1. Ce mot signifie espion, mouchard,