Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/484

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

liberté des Romains ; et Brutus, qui voulait encourager ses convives, ayant demandé une plus grande coupe, la prend à la main, et prononce, sans que rien l’eût amené, ce vers d’Homère :

Je péris, frappé par la destinée cruelle et par la main du fils de Latone[1].


On ajoute même qu’à la journée de Philippes, quand il sortit de sa tente pour le dernier combat, il donna pour mot à ses soldats : Apollon ; c’est pourquoi l’on pensa que ce vers qu’il avait prononcé était comme un présage de sa défaite.

Peu de jours après, Antistius lui remit cinq cent mille drachmes[2], pris sur l’argent qu’il portait en Italie. Tous les soldats qui restaient de l’armée de Pompée, et qui erraient encore dans la Thessalie, vinrent le joindre de bon cœur. Il enleva à Cinna cinq cents chevaux, qu’il conduisait à Dolabella en Asie ; puis, s’étant rendu par mer à Démétriade, comme on en enlevait pour Antoine une quantité considérable d’armes que César avait fait faire pour la guerre contre les Parthes, il s’en rendit maître. Hortensius, préteur de Macédoine, lui remit son gouvernement ; et tous les rois et princes voisins s’unirent à lui, et le secondèrent de tout leur pouvoir.

En ce temps-là il eut nouvelle que Caïus, frère d’Antoine, était parti d’Italie, et venait à Apollonie et à Épidamne[3] prendre le commandement des troupes que Gabinius avait sous ses ordres. Brutus, voulant le prévenir et enlever ces troupes avant son arrivée, part à l’instant avec ce qu’il avait de soldats ; mais il les conduit avec tant de hâte, malgré une neige abondante et des

  1. C’est Patrocle mourant qui parle à Hector, Iliade, XVI, 849.
  2. Environ quatre cent cinquante mille francs de notre monnaie.
  3. Deux villes d’Épire.