Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/567

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tretenait avec ces musiciennes qui ont coutume d’aller chanter et jouer des instruments dans les repas. Cette conduite donna le change aux espions de Nicoclès ; et ils se disaient en riant les uns aux autres : « Il est bien vrai que rien n’est plus timide qu’un tyran, puisque Nicoclès lui-même, qui est maître d’une si grande ville, et qui a sous ses ordres une nombreuse armée, redoute un jeune homme qui passe ses jours à dépenser en amusements et en festins ce qui devrait lui servir à s’entretenir dans son exil. » Et, après ces faux raisonnements, ils retournèrent à Sicyone.

Aratus ne fut pas plutôt sorti de table que, quittant Argos, il alla joindre les soldats qui l’attendaient à la tour de Polygnote, et les conduisit à Némée, où il découvrit son projet à la plupart d’entre eux. Ensuite il excite leur courage par de grandes promesses ; et après leur avoir donné pour mot du guet Apollon favorable, il les mène droit à Sicyone, hâtant la marche à mesure que la lune baissait, puis la ralentissant, pour jouir de sa clarté pendant le reste du chemin, et n’arriver à la maison du jardinier, qui était proche de la muraille, que quand la lune serait couchée. Ce fut là que Caphésias vint à sa rencontre, et lui dit qu’il n’avait pu se rendre maître des chiens, parce qu’ils avaient pris la fuite à son approche ; mais qu’il avait enfermé le jardinier. Cet incident découragea tellement les soldats, qu’ils conseillèrent à Aratus d’abandonner son entreprise, et de se retirer ; mais il les rassura, en promettant de les ramener, si les chiens étaient trop importuns.

En même temps, il se fit précéder par ceux qui portaient les échelles, sous la conduite d’Ecdélus et de Mnasithéus, et les suivit à petits pas. Déjà les chiens aboyaient avec force, et entouraient en courant Ecdélus et sa troupe : néanmoins, ils approchèrent de la muraille, et plantèrent sans obstacle leurs échelles. Les premiers