Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/657

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lius. D’un autre côté, Othon apprenait que les armées de Pannonie, de Dalmatie et de Mésie, avec leurs généraux, s’étaient déclarées pour lui. Vers le même temps, il reçut des lettres très-satisfaisantes de Mucianus et de Vespasien, lesquels commandaient chacun une puissante armée, l’un en Syrie, l’autre en Judée. Ces nouvelles lui rendirent la confiance ; et il écrivit à Vitellius pour lui offrir, s’il voulait renoncer à ses vues ambitieuses, une somme d’argent considérable, et la propriété d’une ville, où il pourrait couler en paix une vie tranquille et douce. Mais Vitellius lui fit une réponse moqueuse, quoiqu’en termes couverts ; et bientôt après, s’étant aigris l’un l’autre, ils s’écrivirent réciproquement des injures, des railleries et des paroles outrageantes ; jusque-là qu’ils se reprochèrent, avec une ridicule folie, mais non sans vérité, les vices qui leur étaient communs, tels que la débauche, la mollesse, l’inexpérience dans la guerre, leur pauvreté passée et leurs dettes immenses ; et il était difficile de décider lequel des deux, sous tous ces rapports, avait l’avantage sur l’autre.

Cependant on annonça des signes et des prodiges : la plupart, à la vérité, étaient incertains et non avoués ; mais on vit, dans le Capitole, une Victoire montée sur un char laisser échapper ses rênes, comme étant impuissante à les retenir. Et dans l’île du Tibre[1], une statue de Caïus César, sans tremblement de terre, ni tourbillon de vent, se tourna tout à coup de l’occident à l’orient. Un pareil prodige arriva, dit-on, à l’époque où Vespasien prit ouvertement le titre d’empereur. Le débordement du Tibre qui survint alors fut regardé généralement comme un mauvais présage, bien que l’on fût dans la saison où les rivières grossissent,

  1. On ne sait pas si l’île dont parle ici Plutarque est l’île du Tibre, à Rome, que les Romains nommaient Entre deux Ponts, ou l’île sacrée, à l’embouchure du fleuve,