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POÈTES MORALISTES DE LA GRÈCE

sera sans respect pour son vieux père ; il l’affligera avec impiété par des paroles cruelles, sans craindre la vengeance des dieux. Les ingrats humains ne payeront plus à leurs vieux parents le prix de leur éducation ; ils renverseront avec violence les habitations de leurs semblables. On n’aura plus d’égards pour le mortel fidèle à son serment, juste, vertueux. On n’honorera que l’homme violent et injuste. La justice et la pudeur ne se rencontreront plus ici-bas. Le méchant attaquera l’honnête homme par des paroles injustes, en y ajoutant de faux serments. L’Envie, au teint livide, aux discours médisants, à la joie cruelle, poursuivra sans relâche les malheureux.

Remontant vers l’Olympe, loin de la vaste terre, et voilant leurs beaux corps de leurs vêtements blancs, la Pudeur et Némésis ont quitté les hommes pour se joindre à la troupe des dieux ; elles ont laissé aux mortels des maux cruels, qui n’auront point de remède.


Je vais maintenant par une fable instruire les rois, tout sages qu’ils sont.

Voici ce que disait un jour l’épervier au rossignol, qu’il emportait au sein des nuages entre ses ongles recourbés. Comme l’infortuné, percé des serres cruelles du ravisseur, se plaignait en gémissant, celui-ci lui adressa ces dures paroles : « Malheureux ! pourquoi ces plaintes ? un plus fort que toi te tient en sa puissance. Tu vas où je te conduis, quelle que soit la douceur de tes chants. Je puis, si je le veux, faire de toi mon repas ; je puis te laisser échapper. Insensé, qui voudrait résister à la volonté du plus fort ! il se-