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POÈTES MORALISTES DE LA GRÈCE

livraient les dieux ! En même temps, les vents soulèvent d’épais tourbillons de poussière, et les transportent, avec les éclairs et les tonnerres, ces traits du grand Zeus, avec les clameurs et le tumulte de la bataille, au milieu des deux armées. Du sein de l’affreuse mêlée s’élève un bruit effroyable ; la force et le courage s’y déployant de part et d’autre, font pencher la balance. Longtemps on avait lutté avec une ardeur obstinée ; mais, au premier rang, avaient livré un combat terrible Cottos, Briarée, le belliqueux Gyas. Trois cents rochers, lancés à la fois par leurs robustes bras, tombaient sans cesse sur les Titans et les couvraient comme d’une nue obscure. Ils les vainquirent enfin, malgré leur orgueilleux courage, et, chargés de durs liens, les envoyèrent au fond des abîmes de la terre, aussi loin de sa surface que la terre l’est du ciel ; car le même espace qui sépare le ciel de la terre sépare aussi la terre du Tartare. Tombant du ciel, une enclume d’airain roulerait pendant neuf jours et pendant neuf nuits, et, seulement à la dixième aurore, toucherait la terre ; tombant de la terre, elle descendrait neuf autres jours, neuf autres nuits, et, à la dixième aurore seulement, entrerait dans le Tartare. Autour du Tartare s’étend un mur d’airain, se répand, dans sa partie la plus élevée, une triple nuit ; au-dessus naissent les racines de la terre et de la mer ; c’est là, dans d’épaisses ténèbres, d’infectes vapeurs, aux dernières bornes du monde, que, par la volonté du roi des cieux, sont ensevelis les Titans. Ils ne peuvent sortir de leur prison ; des portes de fer, qu’y plaça Poséidon, en ferment l’entrée ; d’impénétrables remparts l’investissent ; et là habitent Gyas, Cottos et Briarée, gardes fidèles du