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POÈTES MORALISTES DE LA GRÈCE

enfers ; le puissant Hadès y habite avec la dure Perséphone. Un chien redoutable veille à la porte ; ce monstre farouche, par un instinct perfide, flatte tous ceux qui s’en approchent, il les attire par le mouvement de sa queue et de ses oreilles. Mais, une fois entrés, il ne leur permet plus de sortir, et, attentif à leurs mouvements, il dévore aussitôt quiconque veut repasser le seuil du puissant Hadès et de la dure Perséphone.

Là enfin fait son séjour une divinité odieuse aux immortels ; c’est la redoutable nymphe Styx, fille aînée de l’Océan, ce fleuve dont le courant revient sur lui-même. Elle s’y tient, loin des dieux, dans un palais superbe, dont de hauts rochers forment le faîte, et que, de tous côtés, élèvent vers le ciel des colonnes d’argent. Parfois arrive en ces lieux, après avoir effleuré dans sa course le dos de la plaine liquide, la fille de Thaumas, la rapide Iris, chargée d’un message de Zeus. Elle vient par son ordre, lorsqu’une dispute s’est élevée parmi la troupe céleste, et qu’on y a trahi la vérité, chercher dans un vase d’or l’onde fameuse sur laquelle jurent les dieux. De la crête d’un rocher s’échappe goutte à goutte cette eau glacée. Sous la vaste terre dans l’antre de la nuit noire, coule en flots abondants, détaché du fleuve sacré, un bras de l’Océan. Une dixième partie en a été réservée, tandis que les neuf autres, roulant en bouillons argentés tout autour de la terre, de la mer au vaste dos, s’en vont tomber dans celle-ci. Elle seule coule du rocher, objet d’effroi pour les dieux. Celui des immortels, habitant la cime neigeuse de l’Olympe, qui a profané par un parjure la libation sacrée, perd pendant une année entière l’usage de ses sens ; il